AVIS DES ORGANISMES PUBLICS A PROPOS DE LA LGV


Le Ministère de l’Ecologie, dans le Schéma National des Infrastructures de Transport préconise d’«optimiser le système de transport existant pour limiter la création de nouvelles infrastructures», en précisant que «les prévisions de transport de marchandises par le rail à l’horizon 2020 sont jugées optimistes et un scénario prévoyant des hypothèses plus prudentes serait souhaitable» et ce d’autant plus que «La capacité rendue disponible grâce à des aménagements mineurs de la ligne existante permet de répondre à la demande globale retenue par RFF à l’horizon 2020 dans des conditions qualitatives acceptables».

Pour sa part, la Cour des comptes, en 2008, met en garde l’Etat sur la rentabilité des LGV en rappelant que «Le lancement de nombreux projets dont la rentabilité socioéconomique est insuffisante est d’autant plus inquiétant que les bilans a posteriori des lignes à grande vitesse mettent en évidence une rentabilité en général bien plus faible qu’espérée initialement en raison d’une sous‐estimation des coûts et d’une surestimation du trafic assez systématiques». Dans son rapport public annuel 2010 et au vu de la situation financière du pays, elle préconise donc de «faire mieux avec moins».

Le récent rapport parlementaire de monsieur Hervé MARITON relatif au Schéma gouvernemental de nouvelles infrastructures de transport vient confirmer les critiques émises par nombre d’élus, d’associations et de citoyens quant à l’opportunité financière, économique et environnementale de construire une quinzaine de nouvelles LGV pour un total de 103 milliards d’euros dans les trente ans à venir. M. Hervé MARITON rappelle que « le faible niveau d’autofinancement de ces investissements par le système ferroviaire via les redevances d’infrastructures est un indice important du faible bénéfice socioéconomique prévisible et devrait inciter à rééquilibrer le SNIT vers les investissements de maintenance et de renouvellement du réseau existant ».

Le rapport d’information du 8 juin du Sénat ‐ groupe de suivi sur l’avant‐projet consolidé de SNIT, dirigé par M. Louis NÈGRE ‐ fait état de la nécessité de présenter « une liste de projets hiérarchisés qui répondent essentiellement à une logique d’aménagement du territoire » et relève « que les bilans socio‐ économiques des différents projets inscrits dans le SNIT ne sont pour l’instant que des approximations ». Le groupe de travail constate «que la contribution du schéma à la lutte contre le changement climatique sera modeste» et que «le Gouvernement doit présenter un schéma des besoins de rénovation desréseaux existants, comportant un diagnostic précis et un échéancier des coûts» en rappelant «que la création d’un kilomètre d’une ligne LGV coûte 20 à 25 fois plus cher que la régénération ou l’électrification d’un kilomètre de voie ferrée de base».

Enfin, l’Audition du 22 juin dernier de Mme la ministre Nathalie KOSCIUSKOMORIZET par la Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire a souligné que «le projet de SNIT laisse peu de place aux enjeux du renouvellement, de la régénération et de l’entretien, tant pour la route que pour le ferroviaire», que «la capacité à mobiliser les 260 milliards correspondant aux travaux d’infrastructures envisagés est pour le moins incertaine» et que, plus grave, «Les difficultés de financement du programme LGV conduisent l’État à se tourner vers les collectivités territoriales pour des montants considérables, qui risquent de déstabiliser durablement leurs finances».

Ce à quoi, Mme la ministre répondait que «la position de principe du ministère est aujourd’hui de considérer toutes les options, plutôt que de se focaliser sur les LGV (…). C’est le sens des Assises du ferroviaire que je lancerai au mois de septembre : nous voulons demander aux usagers et aux cheminots de dire ce qu’ils souhaitent à l’horizon 2030 ; le désir de LGV peut être celui des élus plus que celui de nos concitoyens».

A titre accessoire, voici un extrait des très intéressantes conclusions d’un rapport de 2009 de l’OCDE : « Les investissements dans la grande vitesse ferroviaire ne sont pas de nature à tempérer de beaucoup le changement climatique et les investissements dans les trains rapides classiques pourraient être nettement plus profitables ».

De surcroît, un rapport établi par des experts suédois en mai 2010 pour le compte du Parlement Européen affirme sur une analyse de faits réels et non d’éléments virtuels comme l’a été l’étude de RFF sur la future ligne Rhin‐Rhône que le gain en émission de CO2 procuré par les lignes LGV est quasi nul.

Enfin, la France disposant déjà d’un réseau de 30 000 kms de rail que l’Etat (via les Conseils régionaux) argue comme n’ayant pas les moyens financiers d’entretenir, la question se pose de la cohérence à créer des milliers de kilomètre de ligne ferroviaire supplémentaires… Ce choix de décider de lignes nouvelles plutôt que d’optimiser le réseau existant est au coeur de l’opposition grandissante de l’opinion publique et politique.

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